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Les centres d’enseignement confessionnels

Ce point a été, et demeure très polémique, depuis les débats constituants jusqu’au vote des grandes lois scolaires, et jusqu’aux dispositions concernées dans les accords de coopération avec les différentes confessions.
Le texte constitutionnel a voulu aplanir les problèmes par des formules sans aspérités, et par la remise à la loi ordinaire de la résolution des points potentiellement conflictuels, pour ne pas faire resurgir le spectre de la guerre religieuse.
Le développement législatif concerne deux textes qui montrent, à l’intérieur d’un cadre constitutionnel, l’influence de la conjoncture politique. Le premier texte est la loi du 5 juillet 1980, votée sous gouvernement centre droit ; le second est la Ley Orgánica del Derecho à la Educación du 3 juillet 1985 (complétée en 1990), et qui sera le texte le plus controversé des années 1975-85.
La loi de 1980 est une loi très favorable à la création et au financement de centres privés, en particulier confessionnels. Elle est accueillie avec satisfaction par l’épiscopat, qui considère qu’elle est conforme à sa lecture de la liberté religieuse et à la situation socioreligieuse de l’Espagne.
A ce moment, en l’absence d’accords, les autre confessions n’ont pas accès à cette solution.
Cette loi ne met pas, dans la réalité, fin à la bataille religieuse scolaire. Elle est combattue par la gauche, et Felipe Gonzaléz déclare que si le PSOE arrive au pouvoir elle sera abolie.
La grande loi scolaire de l’Espagne post franquiste est donc la LODE de 1985. Elle concerne uniquement l’enseignement basique, qui est l’enseignement gratuit et obligatoire. Son but principal est d’intégrer les différents centres d’enseignement dans un système mixte pour satisfaire au principe du droit de tous à cette éducation basique et gratuite.
Il en découle une volonté de planification rationnelle du financement et d’homologation des centres d’enseignement qui fonctionnent avec les deniers publics. On assiste, concrètement, à une certaine restriction des conditions d’homologation et d’accord de crédits aux centres privés, qui vont exprimer leur crainte, alors qu’ils sont en situation de compétition avec le système public pour dispenser l’enseignement obligatoire et gratuit, de ne pas voir couverts la totalité de leurs coûts.
Le débat sur cette loi voit s’affronter, en fait, deux positions ; celle de la gauche, pour laquelle l’Etat est le dernier responsable de la qualité de l’enseignement obligatoire ; celle de la droite, pour laquelle les prérogatives et responsabilités appartiennent d’abord aux parents et ensuite à l’école. Ce débat est au fond assez parallèle à celui qui existe dans les autres pays occidentaux.
La LODE, fera l’objet d’un recours en inconstitutionnalité introduit par le Grupo Popular (futur PP de Aznar), qui avait demandé, lors des débats parlementaires, que soit inscrit dans la loi l’obligation de financement en cas de conformité. Ce recours en inconstitutionnalité, basé sur différents aspects du respect du droit de libre choix, sera rejeté.
Encore une fois, concernant les confessions minoritaires, aucun accord n’étant encore signé, aucune possibilité légale d’ouverture n’est à ce moment envisageable.
Hors les lois normatives appliquant la Constitution, les conditions d’existence de centres confessionnels d’enseignement sont également régies par l’accord du 3 janvier 1979 avec le Saint-Siège, pour l’Eglise catholique, et les accords de coopération avec les trois grandes religions minoritaires. L’Etat y est garant de la possibilité pour chacune de ces quatre confessions d’ouvrir des centres d’enseignement et d’obtenir un financement pour ce faire.
On peut donc dire qu’au niveau des textes s’exprime la volonté de l’Etat de participer du respect de la liberté de l’enseignement et de la liberté de choix en ce domaine, tout en réaffirmant son monopole et son contrôle.
Qu’en est-il, en quelques mots de la situation actuelle respective des secteurs privé et public ? Notons que c’est en 1976 que le basculement a lieu, et que le public devient majoritaire malgré un enseignement d’Etat encore déficitaire en postes et établissements (ceci étant surtout dû à la fermeture de centre privés non confessionnels).
Les centres privés confessionnels sont aujourd’hui en Espagne des centres catholiques. Il n’existe pas d’école musulmane, ni protestante, et seulement deux école juives.
La présence de l’Eglise catholique dans l’enseignement primaire et secondaire reste très importante, mais elle est inférieure à celle de l’Etat (un tiers-deux tiers).
Un phénomène important à noter est l’augmentation ininterrompue depuis 1978 du nombre de laïques enseignant dans les établissements catholiques, reflet du vieillissement et du manque de renouvellement dans les congrégations enseignantes.
Il ne faut pas oublier la présence, certes numériquement assez faible, mais réelle et de très haute qualité, de l’enseignement supérieur catholique, témoignage de la grandeur passée.
Enfin, une différence importante à souligner apparaît à la lecture des textes. Elle concerne le respect des normes et valeurs. Il est énoncé dans le texte de l’Accord de 1979 avec le Saint-Siège que l’éducation dans les centres publics devra être respectueuse des valeurs et de l’éthique chrétienne (sous-entendu, évidemment, catholique ). Dans le texte des trois convenios, il est énoncé le droit des élèves à recevoir un enseignement de leur confession, y compris à l’intérieur d’établissements privés (donc catholiques) à condition que, dans ces derniers, ce droit n’entre pas en conflit avec le caractère propre du centre. Et, en 2002, une élève, scolarisée dans un établissement catholique qui exigeait qu’elle ôte le tchador qu’elle désirait conserver, a dû être scolarisée dans le secteur public. A méditer...

D 13 septembre 2012    AClaude Proeschel

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