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Croatie

  • Janvier 2019 : L’enseignement religieux dans les écoles publiques est conforme à la Constitution croate

Selon la décision de la Cour constitutionnelle de décembre 2018 (rendue publique en janvier 2019), la position de l’éducation religieuse en tant que matière facultative dans les écoles publiques, et l’éducation religieuse dans les institutions préscolaires, ne contredit pas la disposition constitutionnelle de séparation entre les communautés religieuses et l’État.

Les communautés religieuses en Croatie jouissent d’un large éventail de droits, régis par quatre accords entre la Croatie et le Saint-Siège (en ce qui concerne la position de l’Église catholique) et par la loi sur les communautés religieuses, ainsi que par des accords signés entre le gouvernement et 19 autres communautés religieuses (principalement traditionnelles). L’un des droits dont jouissent l’Église catholique et les autres communautés religieuses qui ont signé des accords avec le gouvernement est le droit d’organiser un enseignement religieux dans les écoles publiques et privées si au moins sept élèves choisissent de suivre cet enseignement. Bien que l’enseignement religieux soit une matière facultative, il devient une matière obligatoire pour les élèves qui s’y inscrivent. Une dispense est possible si les parents (dans les écoles primaires) ou les parents et les élèves (âgés de plus de 15 ans, c’est-à-dire dans les écoles secondaires) soumettent une demande écrite de dispense au directeur de l’école avant le début de l’année scolaire. L’enseignement religieux est confessionnel, les communautés religieuses étant responsables du contenu des manuels destinés à l’enseignement du catéchisme et de l’embauche d’enseignants qualifiés. Après avoir reçu de la communauté religieuse une autorisation spéciale d’enseigner la religion, les enseignants sont employés par les écoles et rémunérés par le ministère de la Science et de l’Éducation et bénéficient des mêmes droits que les autres enseignants.

Depuis son introduction en 1991, la place de l’enseignement religieux dans les écoles publiques est restée un sujet de débat public. Certains critiques, qui ont officiellement déposé une plainte constitutionnelle, ont fait valoir que le fait que l’enseignement religieux confessionnel fasse partie de l’enseignement public violait la disposition constitutionnelle relative à la séparation de l’État et des communautés religieuses. En revanche, la Cour constitutionnelle a fait valoir que, bien que la Constitution opte pour l’égalité de toutes les communautés religieuses devant la loi et pour la séparation des communautés religieuses et de l’État, elle dispose également que les communautés religieuses sont libres de conduire publiquement des services religieux, d’ouvrir des écoles, des académies et d’autres institutions ainsi que des organisations d’aide et de charité, et de bénéficier de la protection et de l’assistance de l’État dans le cadre de leurs activités. Par conséquent, la Cour a conclu que la Constitution croate ne demande pas la "séparation absolue des communautés religieuses et de l’État", et que l’éducation religieuse dans les écoles publiques et les institutions préscolaires, en tant que telle, ne viole pas la disposition constitutionnelle. Elle réaffirme également l’ancien arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme concernant la Croatie (Savez Crkava Riječ Života et autres c. Croatie, requête n° 7798/08), selon lequel, entre autres, l’enseignement religieux dans les écoles publiques et les établissements préscolaires est un droit supplémentaire que l’État croate a volontairement décidé d’assurer. Il est considéré comme un droit supplémentaire relevant du champ d’application plus large de l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Bien que l’arrêt de la Cour constitutionnelle consolide la position de l’enseignement confessionnel dans les écoles publiques pour les années à venir, certains aspects problématiques subsistent. Par exemple, bien que la majorité des élèves optent pour l’enseignement religieux dans les écoles primaires (principalement l’enseignement catholique, la Croatie étant un pays à forte majorité catholique), le fait est qu’aucune matière alternative n’est prévue pour les élèves qui ne suivent pas l’enseignement religieux, ce qui pourrait être interprété comme une discrimination pour les enfants laissés sans surveillance dans les locaux de l’école. Dans les écoles secondaires, cette pratique disparaît, puisque les élèves doivent choisir entre l’enseignement religieux et une matière sur l’éthique. Des attitudes discriminatoires, notamment à l’égard des nouveaux mouvements religieux et des athées, ont été signalées dans certains manuels d’instruction religieuse catholiques. La discrimination se retrouve également dans le fait que les communautés religieuses qui n’ont pas d’accord avec le gouvernement ne peuvent pas bénéficier du droit à l’enseignement religieux dans les écoles. Enfin, ces dernières années, certaines ONG religieuses ont commencé à mobiliser des partisans parmi les parents pour défendre le droit des parents à ce que leurs convictions philosophiques et religieuses soient respectées dans le cadre de l’enseignement général dispensé à leurs enfants.

Pour en savoir plus : Staničić, Frane (2018), "Do We Need a Revision of the Treaties with the Holy See ?", Zbornik Pravnog fakulteta u Zagrebu, 68(3-4):397-429. (in Croatian)

D 11 mars 2024    ASiniša Zrinščak


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