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Allemagne

  • Février 2024 : Abus sexuels au sein de l’Église protestante en Allemagne (EKD) : la fin d’une illusion

La publication, le jeudi 25 janvier 2024, d’une étude sur les abus sexuels dans l’Église protestante allemande (la fédération des Églises protestantes régionales luthériennes, réformées et unies, EKD) a provoqué une onde de choc pour cette dernière. « Journée noire pour l’Eglise protestante », mais « journée positive pour les victimes », a déclaré Detlev Zander, aujourd’hui âgé de 60 ans, victime d’abus sexuels au sein de l’EKD dès son plus jeune âge.
Cette étude indépendante de 864 pages, menée durant trois ans par des chercheurs issus de huit instituts de recherche, commandée et financée par l’EKD à hauteur de 3,6 millions d’euros, lève le voile sur les violences sexuelles perpétrées sur des mineurs - au moment des faits - au sein de l’Église protestante et de ses services d’aide sociale (Diakonie) entre 1946 et 2020. D’après l’équipe chargée de cette étude, le nombre de victimes d’abus sexuels s’élèverait à 2225 et celui des auteurs à 1259, si l’on s’en tient aux documents mis à disposition par les 20 Églises régionales de l’EKD. Il ne s’agit là que de « la « partie émergée de l’iceberg » selon Martin Wazlawik, spécialiste des questions de violences sexuelles sur les enfants et les adolescents, qui a coordonné cette étude et estime que le nombre réel de mineurs victimes d’abus serait supérieur à 9000 et que celui des auteurs présumés avoisinerait les 3500. Il a déclaré qu’il n’était pas possible de fournir un tableau complet des abus sexuels au sein de l’Église protestante, dans la mesure où une seule parmi les 20 Églises régionales (Landeskirchen) concernées a donné librement accès à l’équipe de chercheurs à tous les documents et archives dont elle disposait.
Annette Kurschus, pasteure et théologienne protestante, élue le 9 novembre 2021 à la tête du Conseil de l’Eglise protestante allemande pour six ans, avait déclaré lors de sa prise de fonction que la question des violences sexuelles était une des priorités de l’EKD. À la suite d’accusations selon lesquelles elle aurait couvert un cas d’abus sexuels de la part d’un de ses collaborateurs, lorsqu’elle était pasteure dans une paroisse à Siegen à la fin des années 1990, elle a démissionné le 20 novembre 2023 de ses mandats de présidente du Conseil de l’EKD et de présidente de l’Église protestante de Westphalie.
La présente étude révèle que les cas d’abus sexuels à grande échelle ne concernent évidemment pas seulement l’Église catholique et qu’ils ne représentent pas des cas isolés au sein de l’EKD, mais qu’ils sont liés aux structures et à l’organisation de l’institution. Si les autorités protestantes ont longtemps pensé ou laissé accroire que l’EKD était au-dessus de tout soupçon, sous prétexte que la question du célibat ne se pose pas pour les pasteurs, les auteurs de l’étude ont identifié parmi les facteurs de risque la question de « l’abus de pouvoir des pasteurs », ainsi qu’un manque de clarté quant à la délimitation entre sphère privée et professionnelle, favorisant une culture du silence entretenue par les relations professionnelles et souvent personnelles des salariés de l’institution entre eux. Ils voient également dans la structure fédérale de l’EKD un obstacle à la transparence des procédures et des décisions.
Kirsten Fehrs, actuellement présidente du Conseil de l’EKD, a appelé à un « changement de posture et de culture » au sein de l’Église protestante. Cette dernière ne pourra se soustraire à un processus d’autocritique et de réflexion sur les conditions structurelles et les facteurs systémiques ayant rendu possibles de tels abus et leur dissimulation. Reste à voir si elle saura donner un espace de parole aux victimes et prendre en compte leurs témoignages accablants sur les violences qu’elles ont subies et sur le silence auquel elles se sont heurtées. Le montant des indemnisations, le choix des experts, la participation insuffisante des victimes, etc., voilà autant de questions auxquelles l’EKD devra également faire face sans tarder.

Voir aussi : Deutschlandfunk, Deutsche Welle, Zeit Online, Frankfurter Allgemeine.

  • Juillet 2022 : Rappel à l’ordre du Vatican vis-à-vis des tentatives de réformes de l’Église catholique en Allemagne

Le « chemin synodal », entamé conjointement en 2019 par la Conférence épiscopale allemande et le Comité central des catholiques allemands à la suite du traumatisme provoqué par les révélations sur les violences et les abus sexuels au sein de l’Église catholique outre-Rhin, a abouti à des propositions de réforme relatives aux structures de pouvoir, à la prêtrise et au rôle des femmes, remettant ainsi en question l’enseignement traditionnel de l’Église catholique. Ces tentatives de réformes au sein du catholicisme allemand font l’objet de vives critiques de la part du Vatican, qui a sommé l’Église catholique de ne mettre en œuvre aucune réforme de manière unilatérale, rappelant que le « chemin synodal » n’était pas habilité à imposer de nouvelles formes de gouvernance et de nouvelles orientations en matière de doctrine et de morale.

Le président de la Conférence épiscopale allemande Georg Bätzing et la présidente du Comité central des catholiques allemands (ZdK) Irme Stetter-Karp ont déploré le manque de communication directe entre le Vatican et le « chemin synodal », dans la mesure où la déclaration de Rome n’était pas signée, mais indiquait simplement qu’elle émanait du Saint-Siège, qui refuse toujours d’avoir un entretien avec des représentants du Comité central des catholiques allemands (ZdK).

L’évêque d’Augsbourg, Bertram Meier, connu pour ses positions contre l’ordination des femmes, a salué de son côté le rappel à l’ordre du Vatican. La majorité des deux tiers nécessaire, au sein de la Conférence épiscopale allemande, pour l’adoption des réformes a peu de chances d’être atteinte, d’où le risque majeur de compromettre ces tentatives de réformes inédites.

Pour en savoir plus, voir : Westdeutsche Zeitung et Tagesschau.

  • Juillet 2022 : La gestion des abus sexuels au sein de l’Église catholique dans le diocèse de Cologne

Le cardinal Rainer Maria Woelki, archevêque de Cologne depuis 2014, a confié en décembre 2018 au cabinet d’avocats indépendants Westphal-Spilker-Wastl (WSW) de Münich le soin de réaliser une enquête sur la manière dont les autorités diocésaines avaient traité les cas d’abus sexuels dans le diocèse de Cologne entre 1975 et 2018. Au printemps 2020, il a refusé de rendre public ce rapport, justifiant sa décision par des failles juridiques, certains prêtres ou responsables catholiques étant nommément cités dans ce rapport.

Cette décision ayant été fortement critiquée, un second rapport a été commandé par Rainer Maria Woelki à un autre cabinet d’avocats et finalement publié en mars 2021. Cette expertise met en cause les manquements de prêtres ou de responsables catholiques n’ayant pas signalé des abus sexuels sur mineurs dans le diocèse de Cologne à la fin des années 1970 et ayant ainsi contrevenu à leur devoir au regard du droit canonique.

Face aux tensions dans le diocèse de Cologne, le pape François a décidé en mai 2021 d’y envoyer deux visiteurs apostoliques, les atermoiements autour de la crise des abus ayant sapé la confiance de bon nombre de fidèles envers le cardinal Rainer Maria Woelki. Ce dernier s’est finalement mis en « pause spirituelle » avec l’accord du pape François de septembre 2021 jusqu’au début du carême en mars 2022. A l’issue de cette période, il a repris ses fonctions, tout en précisant qu’il avait présenté sa démission au pape début mars. À ce jour, le cardinal Woelki est toujours en exercice, le pape ayant exprimé le souci de prendre son temps, afin de ne pas réagir sous la pression.

Du reste, des révélations issues d’un rapport relatif à la gestion des violences et abus sexuels dans le diocèse de Munich-Freising, également réalisé par le cabinet d’avocats Westphal-Spilker-Wastl, publié le 20 janvier 2022, ont mis en cause plusieurs évêques, dont Joseph Ratzinger, l’ancien pape Benoît XVI, pour leur gestion des abus sexuels envers des mineurs au sein de l’Église catholique.

Pour en savoir plus, voir : Deutschlandfunk, RP online, Frankfurter Allgemeine Zeitung.

  • Janvier 2022 : Une nouvelle présidente à la tête du Conseil de l’Eglise protestante (EKD) outre-Rhin

Annette Kurschus, pasteure et théologienne protestante allemande, présidente de l’Église protestante de Westphalie depuis 2011, a été élue pour six ans à la tête du Conseil de l’Église protestante allemande (EKD) le 9 novembre 2021 (avec une majorité de 126 voix sur 139 dès le premier tour). C’est la deuxième fois – après Margot Käßmann - que l’Église protestante d’Allemagne est dirigée par une femme. Annette Kurschus a défini les priorités qui attendent l’EKD dans les mois à venir, parmi lesquelles les violences sexuelles. 942 cas d’abus sexuels ont été recensés à ce jour au sein de l’Église protestante allemande (EKD) depuis sa création au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. La direction de l’EKD a été critiquée ces derniers mois par des victimes d’abus sexuels sur la façon dont elle a géré jusqu’à présent ces questions (montant des indemnisations, choix des experts, participation insuffisante des victimes, etc.). Une nouvelle commission permanente doit désormais traiter ce dossier. Chacune des vingt Églises locales (Landeskirchen), membres de l’EKD, peut prendre les initiatives qu’elle souhaite en la matière.

Voir Frankfurter Allgemeine, ZDF.de, Der Tagesspiegel.

  • Juin 2021 : Le pape refuse la démission du cardinal Marx

L’archevêque de Munich et Freising, le cardinal Reinhard Marx, ancien président de la conférence épiscopale allemande, critiqué par des associations sur la façon dont il avait géré des cas d’abus sexuels lorsqu’il était évêque de Trêves entre 2002 et 2008, a présenté en mai dernier sa démission au pape. Dans une lettre, publiée avec l’accord de ce dernier, le cardinal Marx faisait part de sa volonté d’"assumer la part de responsabilité qui revient aux dignitaires de l’Église catholique dans la catastrophe des scandales sexuels au cours des décennies passées". Il dénonçait également la "défaillance institutionnelle ou systémique" de l’Église catholique, arrivée à "un point mort".

Dans une lettre publiée le jeudi 10 juin en réponse à cette demande, le pape a fait savoir qu’il refusait la démission du cardinal Marx, âgé de 67 ans, membre d’un cercle restreint de cardinaux qui le conseillent sur les réformes de la Curie romaine. Il l’a exhorté à continuer sa mission à la tête de l’archidiocèse de Munich, pour contribuer au "renouveau spirituel" de l’Église catholique. L’archevêque de Munich a déclaré qu’il acceptait la décision du pape "par obéissance", tout en se disant "surpris" de ce choix. Le cardinal Marx a présenté sa démission, alors que le pape François a ordonné fin mai une enquête sur le traitement de cas d’agressions sexuelles de mineurs dans le diocèse de Cologne. En publiant la lettre de démission du cardinal et sa propre réponse, le pape donne une portée symbolique sans précédent à cet événement.

Le cardinal Marx avait, du reste, refusé en avril dernier la Croix fédérale du Mérite - une distinction que voulait lui remettre le président allemand Frank-Walter Steinmeier - "par égard pour les victimes d’abus sexuels qui ne se sentent pas prises en considération par l’Église catholique".

Voir :
 "Kardinal Marx bietet Papst seinen Rücktritt an", Deutsche Welle, 4 juin 2021.
 "Papst lehnt Rücktritt von Kardinal Marx ab", Deutsche Welle, 10 juin 2021.
 "Papst Franziskus lehnt Rücktritt von Kardinal Marx ab", Der Spiegel, 10 juin 2021.

  • Mars 2021 : Nouveau scandale d’abus sexuels dans le diocèse de Cologne

Un rapport indépendant (de près de 800 pages), commandé par le diocèse de Cologne et rendu public le 18 mars 2021, met en cause 202 membres du clergé et des laïcs de ce diocèse pour des violences sexuelles infligées à 314 mineurs – âgés de moins de 14 ans pour plus de la moitié d’entre eux – entre 1975 et 2018. Ce rapport a mis hors de cause l’actuel archevêque de Cologne, le cardinal Rainer Maria Woelki, contrairement à son prédécesseur, le cardinal Joachim Meisner, décédé en 2017. Le cardinal Rainer Maria Woelki n’en est pas moins accusé d’avoir géré ces scandales sexuels au sein de son diocèse de manière calamiteuse. L’an passé, il avait refusé de rendre public un premier rapport sur ces questions – commandé par ses soins à un cabinet d’avocats de Munich – sous prétexte notamment de protection de données personnelles. Le juriste Björn Gercke, rapporteur du présent dossier, a déploré de graves lacunes dans les archives mises à disposition pour établir le rapport.

En lien direct avec ce nouveau scandale, le diocèse de Cologne pourrait connaître l’une des plus fortes vagues de sorties d’Église de son histoire. Le tribunal administratif de Cologne vient d’accroître ses capacités d’accueil afin de faire face à l’afflux de demandes qui se dessine dans les semaines et les mois à venir. Depuis les révélations d’abus sexuels au sein du catholicisme allemand il y a une dizaine d’années, l’Église catholique en Allemagne a perdu plus de deux millions de membres. Un rapport commandé par l’Église catholique, rendu public en septembre 2018, avait révélé que 3677 enfants ou adolescents avaient été victimes entre 1946 et 2014 d’abus sexuels commis par plus d’un millier de membres du clergé, dont la plupart n’ont pas été sanctionnés. Harald Dressing, professeur à l’institut de psychologie de Mannheim et coordinateur de l’étude, avait estimé qu’il s’agissait de « l’estimation la plus basse ».

Voir Deutsche Welle et Deutschlandfunk.

  • Mars 2016 : Vers la fin de la "culture de l’accueil" (Willkommenskultur) en Allemagne ?

On se souvient des images de l’élan de solidarité et de générosité de la population allemande - signe de cette culture de l’accueil (Willkommenskultur) - accueillant des flots de réfugiés en gare de Munich au cours de l’été 2015, alors même que d’autres pays européens s’apprêtaient déjà à fermer leurs frontières. Le gouvernement allemand annonçait dès le mois de septembre 2015 qu’il allait débloquer six milliards d’euros supplémentaires pour la prise en charge des demandeurs d’asile et des réfugiés en 2016. Cet engagement massif de l’Allemagne pour accueillir des migrants, majoritairement originaires de Syrie et d’Irak, peut s’expliquer notamment par des motifs économiques et démographiques, mais il est aussi pour la chancelière Angela Merkel une obligation morale. On ne saurait ignorer cependant que le flux ininterrompu des migrants nourrit les doutes grandissants d’une partie de la population sur la politique migratoire de la chancelière et sur la capacité de l’Allemagne à intégrer socialement, économiquement et culturellement ces migrants. On ne peut non plus ignorer que les attaques et les violences xénophobes récurrentes contre les centres d’accueil de demandeurs d’asile ou de foyers de migrants n’ont cessé de se multiplier au cours des derniers mois.

Dans ce contexte de plus en plus explosif, il est légitime de se demander si les vols, les violences et les agressions sexuelles dont ont été victimes des centaines de femmes allemandes dans la nuit de la Saint-Sylvestre à Cologne et dans d’autres grandes villes du pays n’ont pas sonné le glas de la Willkommenskultur en Allemagne. Bien des questions relatives à ces agressions n’ont pas été élucidées à ce jour, mais le procureur général de Cologne a néanmoins révélé en février que plus de 1000 plaintes ont été enregistrées (dont près de la moitié pour délits sexuels), et que parmi les 73 suspects mis en examen la police aurait identifié 30 Algériens, 27 Marocains, 4 Irakiens, 3 Tunisiens, 3 Allemands, 3 Syriens, un Libyen, un Iranien et un Monténégrin, arrivés pour une très grande majorité d’entre eux en 2015 en Allemagne. L’origine étrangère des agresseurs et leur appartenance confessionnelle à l’islam, invoquées pour expliquer les violences survenues dans la nuit du nouvel an, ont déclenché de violentes polémiques dans les médias et sur les réseaux sociaux. Au-delà du traumatisme que représente un tel événement dans la ville très multiculturelle de Cologne et plus largement en Allemagne, on peut s’interroger sur les raisons pour lesquelles ces événements ont dans un premier temps été étouffés ou minimisés par la police de Cologne (voir Presseportal) ou par certains médias. A force de s’autocensurer, de se taire pour éviter d’être accusé d’islamophobie et de nier que les problèmes en matière d’intégration ne sont pas seulement d’ordre économique, le risque n’est-il pas de faire le jeu d’individus ou de groupes xénophobes, du mouvement anti-musulman Pegida (« patriotes européens contre l’islamisation de l’Occident ») ou du parti populiste AfD (« Alternative pour l’Allemagne ») dont l’essor ne semble pas prêt de s’arrêter à la veille d’élections régionales dans trois Länder le 13 mars prochain ?

Face au défi immense que représente la crise des réfugiés, il importe de ne pas se contenter de postures morales ni de céder aux invectives, mais de faire en sorte que les débats sur les questions économiques, démographiques, culturelles (religion, valeurs…) puissent se dérouler en toute liberté.

Pour en savoir plus, voir Die Zeit et Die Welt.

  • Octobre 2013 : Conflits à propos de la construction d’une mosquée à Leipzig

Des voix s’élèvent contre le projet de construction d’une mosquée Ahmadiyya dans le quartier de Gohlis à Leipzig. Jusqu’à présent, les membres de la communauté Ahmadiyya se retrouvaient dans un appartement privé pour prier. Les principaux arguments des adversaires du projet sont du type : « Ce sont des musulmans, ils commettent des crimes d’honneur, des meurtres au nom de leur religion, nous n’avons pas à leur offrir de mosquée ». D’autres estiment que ce projet va accroître la circulation, le bruit... ou craignent des nuisances et des échauffourées avec le voisinage. Le parti d’extrême-droite NPD y a vu une opportunité et a appelé à une « manifestation contre l’islamisation et la présence excessive d’étrangers » début novembre 2013. On a pu assister sur les réseaux sociaux (Facebook…) à un déchaînement de violences verbales anti-islamiques, tandis que des pétitions en ligne contre la construction ont déjà recueilli plusieurs milliers de signatures.

Pour plus d’information, voir Leipziger Volkszeitung.

  • 13 novembre 2012 : Hambourg signe deux accords avec des associations musulmanes et alévie

Après plusieurs années de discussions, la ville-État de Hambourg a conclu deux accords, d’une part avec trois organisations musulmanes (DITIB – Landesverband Hamburg ; SHURA – Rat der islamischen Gemeinschaften in Hamburg ; VIKZ – Verband der islamischen Kulturzentren) et d’autre part avec la communauté alévie (Alevistische Gemeinde Deutschland). Ces accords ont été signés le 13 novembre 2012 par le Sénat de la ville-État et devront encore être approuvés par la chambre basse (Bürgerschaft) avant de pouvoir entrer en vigueur.

Les deux accords dont le contenu est quasi identique confirment pour l’essentiel des droits et obligations constitutionnels et légaux déjà garantis. La principale innovation concerne la reconnaissance juridique de certains jours fériés musulmans ou alévis qui obtiennent le statut de fêtes religieuses.

Les accords réaffirment la liberté de religion pour les croyants musulmans ou alévis et le droit pour leurs communautés de s’organiser librement dans les limites de la loi (art.1). Ils rappellent que les parties sont attachées aux valeurs fondamentales communes de l’ordre juridique constitutionnel, en particulier à la garantie des droits fondamentaux et à la tolérance envers les autres cultures. Les parties condamnent par ailleurs la violence et la discrimination fondée sur l’origine ethnique, le sexe, l’orientation sexuelle, les convictions ou les croyances religieuses et politiques (art. 2 §1).

Elles s’engagent en particulier à garantir l’égalité des sexes et la pleine participation des femmes et des jeunes filles dans la société et dans la sphère politique, scolaire et professionnelle. Celles-ci ne peuvent par exemple voir leurs possibilités professionnelles restreintes de façon injustifiée à cause de tenues vestimentaires liées à leurs convictions religieuses (art. 2 §2).

Trois jours fériés sont reconnus comme des fêtes religieuses au sens de la loi sur les jours fériés de Hambourg (Feiertagsgesetz) : Fête du Sacrifice, Ramadan et Achoura pour les musulmans ; Achoura, Nevruz (21 mars) et Hizir-Lokmasi (16 février) pour les alévis (art. 3).

Les accords réaffirment par ailleurs le droit pour ces communautés de créer leurs propres établissements d’enseignement (art. 4) et de participer aux cours d’enseignement religieux dans les écoles publiques, un groupe de travail étant constitué afin de réfléchir au contenu des programmes et à l’organisation de cet enseignement (art. 4 – musulmans, art. 5 – alévis).

La ville-État de Hambourg encouragera par ailleurs la création d’un centre de formation de théologie musulmane et de pédagogie religieuse à l’Université de Hambourg, afin de former notamment des enseignants pour l’enseignement religieux (art. 5 – musulmans, art. 6 – alévis).

Les autres dispositions des accords concernent l’assistance spirituelle dans les établissements spécialisés (art. 7), la participation dans les médias audiovisuels (art. 8), la garantie des droits de propriété, de construction et d’exploitation de lieux de culte et autres établissements (art. 9), les cimetières et inhumations (art. 10).

Le maire de Hambourg, Olaf Scholz, a salué la conclusion de ces accords comme constituant un succès de la politique d’intégration et le signal d’une volonté forte de coopération. De leur côté, les organisations musulmanes et alévie ont affirmé que ces accords sont d’une importance historique en ce qu’ils marquent la reconnaissance explicite des musulmans de Hambourg comme des citoyens à part entière faisant partie intégrante de la société et reconnus comme des partenaires institutionnels de l’Etat.

Pour en savoir plus :
 Vertrag zwischen der Freien und Hansestadt Hamburg, dem DITIB-Landesverband Hamburg,
SCHURA – Rat der Islamischen Gemeinschaften in Hamburg und dem Verband der Islamischen Kulturzentren
 Vertrag zwischen der Freien und Hansestadt Hamburg und der Alevitischen Gemeinde Deutschland e.V.

  • 20 septembre 2012 : Sorties de l’Eglise, décret de la Conférence épiscopale et décision de la Cour administrative fédérale

En Allemagne, l’Église catholique et les Eglises protestantes perçoivent un impôt cultuel dû par les personnes physiques qui sont imposables sur le revenu, lequel représente 8% à 10% de l’impôt sur le revenu selon les Länder. Le principe constitutionnel de liberté de religion permet à chaque citoyen d’effectuer une déclaration de sortie de l’Eglise auprès du tribunal d’instance afin de décliner toute appartenance religieuse et ne pas acquitter cet impôt.

Le nombre de personnes qui décident de quitter l’Eglise catholique est relativement élevé ces dernières années, en réaction notamment aux affaires de pédophilie. 126 488 personnes sont ainsi sorties de l’Église en 2011 selon les chiffres de la Conférence épiscopale.

En réaction à ce phénomène, la Conférence épiscopale allemande a publié le 20 septembre 2012 un décret relatif à la sortie de l’Église (Kirchenaustritt) qui considère que la démarche de retrait constitue une prise de distance délibérée et volontaire avec l’Eglise et une grave offense à la communauté ecclésiale. Les évêques considèrent qu’il n’est pas possible de séparer l’Eglise-communauté spirituelle de l’Eglise-institution. Le retrait de l’Eglise ne peut donc être partiel et s’accompagne des conséquences juridiques suivantes pour l’individu concerné :

 il ne peut recevoir les sacrements de la confession, l’eucharistie et l’onction des malades - sauf en cas de danger de mort
 il ne peut occuper aucun office ou charge ecclésiastique dans l’Église
 il ne peut être parrain ou marraine
 il ne peut être membre de la paroisse ou des conseils diocésains
 il perd ses droits de vote actif et passif dans l’Eglise
 il ne peut être membre d’une association cultuelle publique
 il doit demander une autorisation à l’ordinaire du lieu s’il souhaite se marier religieusement
 il peut se voir refuser des funérailles religieuses

Le décret prévoit que le ministre du culte compétent doit entrer en contact avec chaque personne ayant annoncé sa sortie de l’Eglise, par l’intermédiaire d’une lettre pastorale et éventuellement lors d’une entrevue, pour l’informer des conséquences de ce retrait, mais également pour l’inciter à réintégrer la communauté ecclésiale avec le plein exercice de ses droits et devoirs.

Textes du décret et de la lettre pastorale sur le site de la Conférence épiscopale allemande.

*La cour administrative fédérale (Bundesverwaltungsgericht) a par ailleurs estimé dans un jugement du 26 septembre 2012 (BVerwG 6 C 7.12) qu’une personne ayant effectué une déclaration de sortie de l’Eglise catholique ne peut se retirer de la seule structure associative et demeurer au sein de communauté de foi. L’appartenance à une communauté religieuse avec un statut public, telle l’Église catholique romaine, a des effets en matière religieuse et également des conséquences en droit étatique liées, par exemple, à l’impôt cultuel. La décision de retrait ne peut concerner les seuls effets juridiques.

Communiqué de presse de la Cour administrative fédérale allemande.

D 19 octobre 2023    ASylvie Toscer-Angot


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