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Le statut de l’Église orthodoxe de Grèce

L’Église orthodoxe de Grèce est établie par l’État avec le statut de personne morale de droit public. A partir de là, les relations entre l’État et l’Église sont généralement régies par le système dit de « régime de lois d’état » selon lequel l’Église possède le statut d’un organisme d’état. L’ordonnance de 1833 stipule que le roi est le chef administratif de l’Église. Le roi Othon est notamment le chef suprême de l’Église et dispose du pouvoir de nommer l’intégralité des membres de son synode. En outre, toutes les décisions synodales doivent être approuvées par lui sans quoi elles sont considérées comme nulles et non avenues. La subordination de l’Église à l’État aboutit à l’identification « institutionnelle » des deux sphères. D’un autre côté, cette interaction donne à l’Église l’opportunité de reproduire son pouvoir social et d’échapper, au moins partiellement, aux effets du processus de sécularisation.

Les caractéristique principales, le « type idéal » du système de « régime de lois d’état », dont différentes formes sont en vigueur en Grèce encore aujourd’hui, sont en principe les suivantes : a) l’État est le décisionnaire final s’agissant des affaires religieuses. L’Église étant typiquement subordonnée au pouvoir politique, les deux sphères ne sont pas sur un pied d’égalité ; b) le christianisme orthodoxe est reconnu en Grèce comme la religion « dominante » de l’État, c’est à dire la religion officielle ; c) l’Église est une personne morale de droit public ; d) l’Église orthodoxe bénéficie d’une position juridique et financière privilégiée par rapport aux autres cultes ; et e) cependant, l’État garantit le droit à la liberté de religion à l’ensemble de ses citoyens.

Après la création de l’État grec en 1830, l’Église orthodoxe s’est proclamée Église nationale en 1833, s’alignant étroitement sur le cadre idéologique de l’État et renforçant l’identité nationale. Il en est résulté une relation symbiotique entre l’Église orthodoxe et l’État grec, caractérisée par une collaboration et un conflit minimal. L’État considérait l’Église comme la "mère de la nation", tandis que l’Église soutenait les politiques nationales et l’idéologie de l’État, y compris les efforts de guerre et la promotion de l’helléno-christianisme.

Tout au long du XXe siècle, en particulier avec la montée des idéologies socialistes et communistes dans la société grecque, l’Église a joué un rôle de plus en plus vital en tant que rempart contre le communisme. Elle a joué un rôle clé dans la formation et la perpétuation de l’idéologie de l’helléno-christianisme ou de l’helléno-orthodoxie, qui fusionne les identités grecque ancienne, byzantine et moderne. Cette idéologie affirme l’unicité de la nation grecque, divinement bénie, en mettant l’accent sur la continuité historique et biologique. Elle propage l’idée que la véritable identité grecque nécessite l’adhésion à l’orthodoxie, mêlant ainsi religion et nationalisme.

Le discours de l’Église critique souvent les valeurs occidentales telles que les idéaux des Lumières, la modernité, l’individualisme et les droits de l’homme, tout en exaltant les vertus de l’Orient, en particulier de l’Empire byzantin et du christianisme orthodoxe.

L’article 3 de la Constitution (1975, révisée en 2019) désigne l’orthodoxie orientale comme la religion dominante en Grèce, soulignant son unité doctrinale avec la Grande Église du Christ de Constantinople et d’autres Églises adhérant aux mêmes croyances. En outre, le Parlement grec détient l’autorité législative sur les questions religieuses (article 72, paragraphe 1). Les détails des relations entre l’État et l’Église sont décrits dans la loi 590/1977 (Journal officiel du gouvernement A’ 146), qui prévoit la coopération entre l’Église et l’État sur des questions d’intérêt mutuel, notamment l’éducation des jeunes, les services religieux militaires, le soutien au mariage et à la famille, la préservation des reliques et des monuments religieux, l’instauration de nouvelles fêtes religieuses et la protection contre les insultes à caractère religieux.

Malgré la baisse du nombre de fidèles et de la confiance du public au cours des dernières décennies, l’Église orthodoxe continue d’influencer les normes sociétales et le discours politique, conservant ainsi un rôle important dans la société grecque.

D 14 juin 2024    AAlexandros Sakellariou AKonstantinos Papastathis

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