eurel     Données sociologiques et juridiques sur la religion en Europe et au-delà

2019

  • Mai 2019 : Profanations de tombes en Roumanie

Au cours des deux derniers mois, les médias roumains ont signalé plusieurs cas de profanation de cimetières.
Celui qui a attiré le plus l’attention est la profanation de 73 tombes au cimetière juif de la ville de Huși, comté de Vaslui, dans le nord-est de la Roumanie. Considérés comme des actions antisémites, les faits ont été condamnés au plus haut niveau, au niveau tant national qu’international. Il y a eu des réactions du côté de la Fédération des communautés juives de Roumanie (FCER), de l’administration présidentielle roumaine, du gouvernement roumain, des autres confessions religieuses et de plusieurs ONG. En effet, après l’incident de Huşi, le gouvernement roumain a réaffirmé, à travers un communiqué de presse, sa détermination à lutter contre l’antisémitisme et son incitation, encourageant la solidarité en tant que fondement d’une société démocratique et moderne. L’ambassadeur américain en Roumanie, accompagné d’un vice-Premier ministre du gouvernement roumain, était également présent à Huşi. Mais la prise de position la plus vigoureuse a été celle du président d’Israël et de six anciens ambassadeurs américains en Roumanie qui, dans une lettre commune, ont attiré l’attention sur la hausse de l’antisémitisme en Roumanie.
Des enquêtes menées par les autorités roumaines ont révélé que le vandalisme du cimetière juif de Huși était le résultat d’actes de défi. Ces actes ont été commis par trois mineurs, âgés de 15 à 16 ans, qui ont reconnu leur culpabilité en expliquant qu’ils faisaient des démonstrations d’arts martiaux et ont ainsi brisés les monuments funéraires, rendus fragiles par l’usure du temps. Les enquêteurs ont également constaté que la plupart des pierres funéraires mentionnées avaient déjà été touchées à l’occasion de l’abattage de certains arbres du cimetière.
Selon le dernier recensement de 2011, la communauté juive de la ville de Huşi est composée de 12 personnes.

Un autre cas de profanation de tombes, qui a fait la une des journaux, a eu lieu dans le cimetière international des héros de Valea Uzului, Bacău, à l’est de la Roumanie, où 52 croix ont été recouvertes de sacs en plastique noirs. Dans ce cimetière sont enterrés les restes de 1143 soldats de différentes nationalités qui ont combattu pendant la Première Guerre mondiale. Deux communautés voisines se disputent l’administration du cimetière, l’une d’elles appartenant à la minorité hongroise. Les croix profanées ont été récemment mises en place par la communauté roumaine de la ville Dărmănești et appartiennent à des héros roumains. Elles ont été recouvertes de sacs en plastique par trois personnes faisant partie d’un groupe d’initiative civique qui considèrent que ces croix ont été placées illégalement.
Le dirigeant du parti de la minorité hongroise en Roumanie (UDMR) a demandé au Premier ministre roumain de cesser de porter atteinte à la mémoire des soldats hongrois et d’intervenir pour contester la décision de la mairie de Dărmăneşti de placer des tombes pour des soldats roumains dans un cimetière où sont enterrés des soldats hongrois. Selon l’UDMR, le cimetière militaire appartient à la communauté hongroise et a été rénové à partir des ressources propres de la mairie et des dons du ministère hongrois de la Défense. Il y a même eu un appel dans ce sens au Premier ministre roumain de la part du ministère des Affaires étrangères de Hongrie.
La cérémonie d’inauguration du cimetière international de Valea Uzului, initialement prévue pour le 17 mai 2019, a été reportée.
Il existe des soupçons selon lesquels l’action des militants hongrois au cimetière militaire de Valea Uzului aurait eu lieu alors que l’UDMR risquait de ne pas atteindre le seuil requis de 5 % des suffrages lors des élections au Parlement européen, en vue d’entraîner une mobilisation massive de son propre électorat, sensible aux enjeux nationalistes et identitaires.

Dans les deux cas, les motivations de la profanation ne semblent pas religieuses : liées à l’inconscience de jeunes dans la première affaire, et plutôt de type politique, rattachées à des motivations nationalistes dans la seconde. La première affaire, cependant, révèle un contexte religieux sensible : celui de l’antisémitisme en Roumanie, qui fragilise sa communauté juive déjà sur le déclin (voir un article de la BBC).

  • 24 Janvier 2019 : Une nouvelle modalité pour l’inscription aux cours de religion

Une nouvelle modalité pour l’inscription au cours de religion a été introduite par l’ordre du ministère de l’Education n° 3.218/16 février 2018, voir l’article dans la rubrique « Droit et religion ».

  • 16 janvier 2019 : Étourdissement des animaux/abattage religieux : enjeux électoraux et raisons des attitudes anti-UE

Les Européens occidentaux débattent de l’abattage religieux depuis plusieurs siècles déjà. Actuellement, la question est de concilier les droits religieux des humains et le droit des animaux à être traités humainement. Les défenseurs des droits des animaux militent pour des animaux étourdis avant qu’ils ne soient sacrifiés, une pratique qui va à l’encontre des principes de plusieurs religions dont les lois alimentaires prévoient exactement le contraire. Au fil du temps, ce débat a été instrumentalisé par des confrontations religieuses, économiques ou politiques, mais le dilemme originel persiste encore aujourd’hui : interdire ou non ce qu’on appelle communément « l’abattage religieux » (le sacrifice d’animaux sans étourdissement préalable). À travers son intégration au sein de l’UE, la Roumanie a dû se conformer à la directive de l’UE qui autorise l’abattage des animaux uniquement s’ils sont préalablement étourdis. Il s’est avéré que cette directive était presque impossible à respecter pleinement. En 2007, en Roumanie, il existait environ 4,5 millions de fermes et de foyers dans lesquels les autorités vétérinaires prédisaient que 1,5 million de porcs pour Noël et un nombre similaire d’agneaux pour Pâques seraient sacrifiés. Théoriquement, la procédure d’étourdissement était obligatoire, mais elle était pratiquement absente. Enfin, la solution, qui perdure jusqu’à aujourd’hui, était que les institutions européennes ferment les yeux sur les abattages réalisés à ces occasions.
Lors des négociations à Bruxelles, les Roumains ont demandé que le sacrifice des animaux à Noël et à Pâques soit une exception à la règle, comme le sacrifice pratiqué par les musulmans et les juifs. La Commission a rejeté cette proposition parce que la directive prévoit une exception uniquement pour les rituels religieux, alors que les pratiques roumaines sont considérées comme traditionnelles et non comme rituelles.

Cet événement malheureux a été utilisé en Roumanie de deux façons : électorale et anti-européenne.
En janvier 2009, deux députés européens roumains ont déclaré dans la presse roumaine avoir réussi à modifier la directive 93/119/CE. Ils ont déclaré avoir introduit une nouvelle exception à la règle de l’étourdissement en plus de celles proposées par le rapporteur Janusz Wojciechowski (question écrite de Janusz Wojciechowski à la Commission, Labelling of meat obtained from animals slaughtered without prior stunning (Étiquetage de la viande obtenue à partir de l’abattage d’animaux sans étourdissement préalable), le 8 septembre 2008). Ils ont plaidé leur cause devant la Commission de l’agriculture et du développement rural du Parlement européen, arguant que les amendements étaient nécessaires pour préserver les traditions roumaines de Pâques et de Noël. Plusieurs chaînes de télévision les ont présentés lors de visites de ménages d’agriculteurs visant à annoncer qu’ils n’auraient plus à étourdir leurs animaux. Une ONG roumaine a lancé une action contre cette affaire et a prouvé que leurs déclarations étaient inexactes : les parlementaires avaient tenté, mais sans succès, d’apporter des modifications à la directive susmentionnée ; la demande du rapporteur Janusz Wojciechowski d’amender cette même directive faisait référence à la possibilité d’étiqueter la viande obtenue à partir d’animaux abattus sans étourdissement préalable, et pas du tout à une éventuelle dérogation aux règles imposées par la directive. Considérant que les deux rapporteurs étaient membres du même parti, et que l’un deux était candidat à l’élection présidentielle de 2009, leur action de lobbying aux côtés des institutions européennes a été interprétée comme une action électorale.
Ce type d’approche concernant les droits des animaux a également été l’occasion d’opinions anti-européennes. Plusieurs personnalités publiques, défenseurs présumés des valeurs chrétiennes orthodoxes, se sont montrées critiques vis-à-vis des réglementations concernant l’étourdissement, au nom de la fidélité orthodoxe. Leur principale critique était que l’Union européenne, à travers de telles directives, visait à détruire les traditions religieuses des Roumains, ce qui provoquerait à son tour la destruction du village traditionnel roumain, qu’ils considéraient comme les principaux piliers du peuple roumain. Une brève clarification doit être faite à ce sujet : la coutume de sacrifier un cochon pour Noël n’a pas de fondation dans le christianisme, encore moins dans l’orthodoxie ; l’origine de cette tradition est païenne, pré-chrétienne, et a une explication plus pragmatique, alimentaire plutôt que religieuse.

Pour plus d’information voir : Iordan BĂRBULESCU, Gabriel ANDREESCU, "Animal stunning, the EU, and the Romanian lobby", Romanian Journal of Bioethics, Vol. 8, No. 1, January – March 2010, p. 190-199.

  • 14 janvier 2019 : La visite du pape François en Roumanie confirmée pour 2019

L’administration présidentielle a officiellement annoncé la visite du pape François en Roumanie cette année (voir aussi le débat de mai 2017).

A la suite de l’invitation du président de la Roumanie, du gouvernement roumain et de la Conférence des évêques catholiques de Roumanie, le pape François effectuera une visite apostolique en Roumanie du 31 mai au 2 juin 2019.

La visite a été confirmée par le Saint-Siège, mais aussi par le Patriarcat roumain, qui a annoncé que le pape sera reçu par Sa Béatitude Daniel, le Patriarche de l’Église Orthodoxe Roumaine.

Le programme de la visite du pape en Roumanie comprendra des manifestations organisées dans les villes de Bucarest, Iasi, Blaj et le sanctuaire de la Vierge de Şumuleu Ciuc (le centre du plus grand pèlerinage catholique d’Europe centrale et orientale). De plus, une rencontre avec le Patriarche de l’Église orthodoxe roumaine et le Saint-Synode de l’Église orthodoxe roumaine aura lieu lors d’une cérémonie religieuse organisée à la Cathédrale nationale nouvellement sanctifiée.

  • 14 janvier 2019 : Les cultes dans le contexte de la présidence roumaine du Conseil de l’Union Européenne

Le 1er janvier 2019, la Roumanie a pris pour la première fois la présidence tournante du Conseil de l’Union Européenne.

Le 10 janvier, à Bucarest, a eu lieu la cérémonie d’ouverture de cette présidence en présence des responsables européens, des autorités roumaines, ainsi que des représentants de certains cultes en Roumanie.

Le jour même, a été publié une interview de la direction du Secrétariat d’État aux cultes. À cette occasion, il a été annoncé que le Secrétariat d’Etat aux cultes organisera, en partenariat avec le Patriarcat roumain (Église orthodoxe roumaine), un événement dans le contexte de la Présidence roumaine du Conseil de l’UE, afin de promouvoir au niveau européen le modèle roumain de la relation entre cultes et État. L’événement se composera d’une conférence internationale intitulée « La dimension positive de la liberté de religion : comment les gouvernements peuvent-ils soutenir les organisations religieuses » qui aura lieu les 6 et 7 juin 2019, au Palais du Patriarcat roumain à Bucarest (l’évènement est également signalé sur le site officiel de la Présidence roumaine de l’UE).

Source : Qmagazine.

  • 8 janvier 2019 : Les religions classées comme faible risque fiscal

Les représentants de l’Agence Nationale pour l’Administration Fiscale (ANAF) ont récemment fait savoir que, conformément à l’Ordonnance d’Urgence du Gouvernement n° 25/2018 (en roumain) modifiant le Code fiscal, les religions ont été classées comme présentant un faible risque fiscal.

Selon la nouvelle réglementation, à partir de 2019 les contribuables seront divisés en trois catégories de risque : a) les contribuables à faible risque fiscal ; b) les contribuables à risque fiscal moyen ; c) les contribuables à risque fiscal élevé. Les critères pour déterminer la classe de risque sont l’enregistrement fiscal, les déclarations d’impôts, le niveau de déclaration et d’exécution des obligations de paiement vis-à-vis du budget général consolidé.

En fonction de cette classification, des contrôles périodiques seront effectués.

À la suite de l’analyse des risques, les représentants de l’ANAF ont déclaré qu’aucun risque fiscal significatif n’a été évalué en ce qui concerne les activités spécifiques des organisations cultuelles. Par conséquent, aucune action de contrôle n’est requise. Dans ce contexte, les représentants de l’ANAF ont fait savoir qu’aucune action de contrôle n’avait été menée dans les organisations cultuelles dans les années 2017 et 2018. Cette décision est motivée par le fait que les religions bénéficient, dans certaines conditions, d’une exonération fiscale et sont en même temps dispensés de l’utilisation de caisses enregistreuses électroniques. Ces facilités fiscales accordées aux cultes sont dues à leur statut d’entités légales d’utilité publique reconnu par la loi 489/2006 sur la liberté de religion et le régime général des cultes, selon lequel les cultes exercent des activités économiques qui ne visent pas à réaliser un profit à des fins privées, mais visent un intérêt public général ou celui de certaines collectivités.

D 28 mai 2019    AGabriel Birsan

CNRS Unistra Dres Gsrl

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