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Turquie

  • Juin 2023 : La désignation de conseillers spirituels dans les écoles

L’enseignement religieux est obligatoire à l’école en Turquie en vertu de la Constitution turque de 1982. Il est dispensé par des enseignants spécialement formés, sous le nom de cours de « culture religieuse et morale ». De nouvelles dispositions prises récemment modifient cependant cet enseignement, et suscitent le questionnement dans le pays.

En effet, dans le but d’inculquer aux élèves des valeurs culturelles, spirituelles, morales, humaines et nationales, des « conseillers spirituels » (voir le document définissant cette profession rédigé par Mesleki Yeterlilik Kurumu, l’institution de qualification professionnelle) sont missionnés dans le cadre de protocoles signés entre les directions locales de l’Éducation nationale et les directions locales des Affaires religieuses.

De plus, selon l’article 9 de l’arrêté de décembre 2006 concernant les heures de cours et d’heures supplémentaires, en cas de pénurie d’enseignants, des directeurs et enseignants du ministère de l’Éducation nationale, et les fonctionnaires officiels autres que les directeurs et enseignants, ainsi que ceux qualifiés d’experts et de formateurs peuvent se voir confier des heures supplémentaires d’enseignement. Cette réglementation ouvre la voie à l’emploi de personnels non enseignant pour dispenser des cours dans les établissements scolaires. Notamment, en cas de pénurie d’enseignants pour les matières de culture religieuse et morale, des imams et d’autres ministres du culte peuvent être engagés sous contrat à durée déterminée pour dispenser ces cours.

Par ailleurs, les conseillers spirituels qui travaillent principalement dans les hôpitaux, les établissements de services sociaux, les établissements pénitentiaires et les bureaux de conseil familial peuvent également intervenir dans les écoles du fait des protocoles signés à cet effet. Les conseillers spirituels, rattachés à la Présidence des Affaires religieuses (Diyanet), peuvent ainsi être sélectionnés si nécessaire parmi les prédicateurs, les spécialistes des services religieux, les enseignants des cours coraniques et les enseignants.

Le projet Çevreme Duyarlıyım, Değerlerime Sahip Çıkıyorum (« Je suis sensible à mon environnement et je défends mes valeurs »), réalisé en collaboration entre le ministère de l’Éducation nationale de la République de Turquie, la présidence des Affaires religieuses de la République de Turquie et le ministère de la Jeunesse et des sports de la République de Turquie, ainsi que les protocoles signés localement, permettent aux ministres du culte d’intervenir en tant que conseillers spirituels dans les écoles.

Pour mieux former ces conseillers, certaines universités proposent même un programme de master intitulé « Conseil et orientation spirituelle », comme le master de l’université Zaim d’İstanbul qui comprend principalement des cours de psychologie et des enseignements sur les doctrines religieuses, notamment sur l’islam.

Ces derniers jours, les médias ont fait état de nominations de conseillers spirituels dans des villes telles qu’Eskişehir et İzmir, dans le cadre de ce projet et de ces protocoles qui permettent aux ministres du culte de donner des cours dans les écoles. Les principales critiques portent sur le fait que des personnes sans formation pédagogique puissent enseigner dans les établissements d’enseignement, et sur le fait que les cours dispensés par des religieux peuvent conduire à des discours qui impactent la liberté de croyance ou mènent à des polarisations.

Kerem Görkem Arslan
  • Octobre 2014 : L’introduction des cours de théologie chrétienne dans les programmes des écoles en Turquie

L’enseignement de la religion à l’école a toujours été une question épineuse en Turquie, en particulier pour la communauté alévie, une branche hétérodoxe de l’islam. Des plaintes ont été exprimées par des ressortissants turcs alévis, concernant le contenu des cours de religion et de morale obligatoires dans les écoles, qui sont basés sur la compréhension sunnite de l’islam. Suite à cela, en septembre 2014, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a rendu un verdict, déclarant que le système éducatif turc n’est pas encore en mesure d’assurer le respect des différentes convictions, et que la Turquie doit réformer son enseignement des programmes d’études religieuses dans les écoles.
Le gouvernement turc a critiqué le verdict en exprimant la nécessité de l’enseignement des valeurs morales pour prévenir une information religieuse qui serait néfaste et incorrecte. En ce début du mois d’octobre 2014, le ministre de l’Education nationale Turque a déclaré que l’enseignement de la théologie chrétienne serait inclus dans le programme des écoles pour les élèves issus de milieux chrétiens. Il a également annoncé la préparation d’un programme d’enseignement religieux par des citoyens juifs.

Source : Daily Sabah.

Nihal Durmaz
  • 22 septembre 2014 : le port du voile est désormais autorisé dans les lycées en Turquie :

A la suite de la réunion du Conseil des Ministres du 22 septembre 2014, à Ankara, le porte-parole du gouvernement et vice-Premier ministre Bülent Arinç a annoncé que le règlement concernant les interdictions et les autorisations vestimentaires a été modifié. Selon les explications d’Arinç, le terme de « tête découverte » présent dans le paragraphe « e » de l’article 4 du règlement, ainsi que la dernière phrase de ce même paragraphe, ont été abrogés.
Ce changement est présenté comme une mesure destinée à élargir les libertés individuelles ; il a été cible de vives critiques. L’opposition laïque estime qu’il s’agit d’ un acte visant à renforcer l’islamisation du pays, en soulignant que les libertés ne sont élargies que dans un seul domaine.

Pour en savoir plus voir Le Nouvel Observateur.

Nihal Durmaz
  • 16 septembre 2014 : la CEDH appelle la Turquie à réformer l’enseignement obligatoire de la religion dans le système éducatif turc

A la suite de la mise en place de cours de religion obligatoire en Turquie, 14 citoyens turcs de confession alévie avaient demandé en 2005, la révision du programme d’enseignement de la culture religieuse et morale en tenant compte de la culture et de la philosophie alévie. Face à l’absence de réponse du ministère de l’Education, les mêmes avaient fait appel auprès de la Cour Européenne des Droits de l’homme (CEDH) en 2011, estimant que le contenu des cours obligatoires de culture religieuse et morale mettait en avant l’approche sunnite de l’islam.
Le 16 Septembre 2014, la CEDH a donné son verdict en appelant la Turquie à réformer l’enseignement religieux à l’école. Rappelant que le système éducatif turc devait garder sa neutralité et son impartialité sur les questions religieuses afin de garantir le respect des différentes convictions, la CEDH a condamné la Turquie pour violation du droit à l’instruction. La cour a estimé que la Turquie devait rapidement mettre en place des moyens appropriés pour remédier à cette situation, en instaurant un système de dispense donnant un caractère facultatif à ces cours.
Suite à la décision de la CEDH, le premier ministre turc Ahmet Davutoglu a affirmé que la décision de la CEDH sera examinée par l’exécutif turc, tout en rappelant l’importance de l’enseignement d’une culture religieuse appropriée. L’arrêt sera définitif dans un délai de trois mois, si aucune partie ne demande d’ici-là son réexamen par la Grande chambre de la Cour.

Pour en savoir plus : Le Nouvel Observateur, Zamanfrance, Radikal (en turc).

Nihal Durmaz

D 13 juin 2023    AKerem Görkem Arslan ANihal Durmaz

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