eurel     Données sociologiques et juridiques sur la religion en Europe et au-delà
Vous êtes ici : Accueil » Chypre » Religion et société » Minorités religieuses

Minorités religieuses

Présentation générale

Cette rubrique commente la présence sociale des minorités religieuses présentes à Chypre. Pour plus d’information sur les religions à Chypre, voir la rubrique données socio-religieuses. Pour (...)

Cette rubrique commente la présence sociale des minorités religieuses présentes à Chypre. Pour plus d’information sur les religions à Chypre, voir la rubrique données socio-religieuses.

  • Pour plus d’information, voir Mineurel, site d’information sur les minorités religieuses, sur Chypre.

D 5 mars 2012   

La communauté arménienne

Les relations entre l’Arménie et Chypre remontent à la fin du 6e s., lorsqu’environ 10 000 Arméniens, qui avaient été fait prisonniers pendant les guerres entre les empires perse et byzantin, (...)

Les relations entre l’Arménie et Chypre remontent à la fin du 6e s., lorsqu’environ 10 000 Arméniens, qui avaient été fait prisonniers pendant les guerres entre les empires perse et byzantin, furent installés sur l’île en tant que mercenaires. Durant la période latine, les mariages entre les maisons royales des Lusignans et du royaume cilicien continuèrent à consolider les liens entre l’île et le peuple arménien. La proximité géographique de l’île, située au large des rives de Cilice, permit à de nombreux Arméniens fuyant les raids arabes du début du 14e s. de se réfugier sur l’île. Les villages de Platani, Kornokipos et Spathariko furent construits afin d’accueillir les nouveaux arrivants.

Toutefois, au début de l’administration britannique, seul un petit nombre d’Arméniens vivaient à Chypre, pour la plupart dans les zones urbaines de Larnaca et Nicosie. Le début des persécutions de l’Empire ottoman à l’encontre des Arméniens et le génocide de 1915 ont profondément bouleversé la communauté arménienne de Chypre. Chypre redevint un refuge pour des milliers d’Arméniens originaires d’Anatolie occidentale. Toutefois, pour la majorité de ces "Boat People", comme on les surnomma, l’île demeurait un lieu de transit, depuis lequel ils poursuivaient leur émigration vers d’autres destinations, principalement la Grande-Bretagne et les Etats-Unis.

La communauté arménienne actuelle est principalement composée des descendants de ces réfugiés du génocide. Jusqu’en 1963, la majorité des Arméniens vivaient dans un quartier de Nicosie majoritairement turcophone. Avec l’éclatement de conflits interethniques, presque toute la communauté, constituée d’environ 3 500 personnes, migra vers le sud, pour vivre au sein de la majorité chypriote grecque.

Selon les estimations du bilan démographique de 2004, les Arméniens de Chypre représentent environ 0,3 % de la population totale de l’île. Ils sont essentiellement de confession grégorienne apostolique, bien qu’il y ait également quelques familles catholiques et protestantes. Cette diversité confessionnelle n’a toutefois pas constitué un obstacle aux mariages au sein de la communauté arménienne. La chute du bloc de l’est a poussé de nouveaux Arméniens à immigrer vers Chypre, cette fois à partir de la République d’Arménie. L’intégration de ces nouveaux arrivants au sein de la communauté constitua un défi important.

Depuis les années 1930, l’Eglise apostolique arménienne de Chypre se trouve sous la juridiction du Catholicossat d’Antélias, au Liban. Dans les années 1980, une nouvelle église, disposant d’une école élémentaire, fut construite à Nicosie pour répondre aux besoins de cette communauté grandissante.

Les centres historiques de la vie arménienne à Chypre sont le monastère de Sourp Magar dans la région de Kérynia, un ancien monastère copte cédé à l’Eglise arménienne par les Ottomans, et l’Eglise de St. Asdvadzadzin dans la vieille ville de Nicosie, qui fut construite au 13e s. à l’origine pour abriter un cloître pour des nonnes bénédictines. Aujourd’hui, il ne reste que des ruines de ces deux centres. Situés dans le nord de l’île, la communauté ne pouvait y accéder. Les tentatives pour sauver ces lieux d’héritage culturel et religieux ont amené les Arméniens chypriotes à faire appel à des organisations caritatives de la diaspora arménienne.

Le Melkonian Educational Institute (MEI – Institut Melkonian), situé à Nicosie, fut également un centre d’une grande importance pour la vie de la diaspora arménienne. Orphelinat fondé en 1926 par Krikor et Garabed Melkonian, il est ensuite devenu une institution majeure de la diaspora, dispensant un enseignement secondaire arménien aux jeunes tant Arméniens que Chypriotes ou d’autres nationalités. La décision de l’Union Générale Arménienne de Bienfaisance (UGAB) de fermer l’école en 2005 est susceptible d’avoir un impact, non seulement sur la communauté arménienne de Chypre, mais également sur la diaspora arménienne en général. Les Arméniens de Chypre sont actuellement à la recherche de nouvelles façons de fournir un enseignement secondaire aux membres de leur communauté.

D 12 septembre 2012    AIrene Dietzel

La communauté latine

L’histoire de la communauté latine de Chypre est celle de populations urbaines et d’institutions monastiques. Le terme "latine" se rapporte aux Chypriotes catholiques romains d’origine (...)

L’histoire de la communauté latine de Chypre est celle de populations urbaines et d’institutions monastiques. Le terme "latine" se rapporte aux Chypriotes catholiques romains d’origine européenne, ce qui les distingue des Catholiques arméniens ou maronites. La présence latine sur l’île remonte aux principales étapes de colonisation à l’époque des Lusignan (1192-1489) et des Vénitiens (1489-1572). Avec le début de la domination franque sur l’île, la bulle du pape Célestin III de 1196 fait de l’Eglise catholique la principale Eglise de Chypre, ce qu’elle resta jusqu’à la conquête ottomane en 1571. Durant cette période hégémonique, l’Eglise latine renforça sa suprématie en réduisant le nombre d’évêchés grecs orthodoxes de 14 aux 4 existants aujourd’hui (Paphos, Larnaca/Kition, Kyrénia et Nicosie).

Durant la période ottomane, l’Eglise catholique romaine perdit sa suprématie sur Chypre. Toutefois, les organisations monastiques continuèrent de fonctionner sur l’île et de répondre aux besoins, non seulement des habitants catholiques, mais aussi des nombreux pèlerins chrétiens qui faisaient escale à Chypre au cours de leur voyage vers la Terre Sainte.

Le couvent franciscain de St. Lazare fut fondé à Larnaca en 1593. Ce couvent étant également un lieu important pour l’Eglise orthodoxe, il s’avera être l’enjeu de conflits – en 1784, à la suite des protestations du clergé orthodoxe auprès des autorités ottomanes, la célébration de services latins fut interdite dans l’Eglise. Auparavant, le recouvrement des espaces rituels orthodoxes et catholiques était monnaie courante – par exemple une église orthodoxe à Aya Napa abritait un autel séparé pour la célébration des sacrements selon le rite catholique.

Toutefois, le maintien de la présence et de l’influence catholique continua d’être un souci majeur pour les autorités catholiques d’Europe occidentale. En 1629, la Congrégation pour la propagation de la foi (Propaganda Fidei) fonda un évêché catholique romain à Paphos sous la juridiction duquel furent placés Latins et Maronites.
Tout au long du 18e s., les moines franciscains et capucins maintinrent des maisons religieuses à Paphos et Larnaca. A la fin du siècle, les Vénitiens ravivèrent les liens durables qui les unissaient à l’île et établirent un consulat à Larnaca. Le port de Larnaca attira comme un aimant de nombreux catholiques européens occidentaux exerçant des activités commerciales. Des Italiens et des Maltais commencèrent à s’installer dans la ville et ses alentours et l’italien devint une langue importante pour les affaires de ce port. Selon les récits de voyageurs du 19e s., on comptait aussi environ 1 000 Grecs catholiques (Uniates) vivant dans la ville.

Le 19e s. à Chypre vit s’intensifier l’activité missionnaire. Les activités des protestants américains tournèrent court (1833-1841), suite aux accusations de prosélytisme émises par l’Eglise orthodoxe et à son opposition ouverte ; les soeurs de l’ordre catholique romain de St Joseph de l’Apparition fondèrent cependant un hôpital, une pharmacie et une école de filles en 1844. D’autres petites écoles, créées vers la fin du 19e s. dans la région de Limassol, durent fermer du fait de la concurrence des prospères établissements d’enseignement orthodoxes grecs.

Tout comme les maronites et les catholiques, les latins sont l’une des communautés religieuses officielles de la majorité chypriote grecque de l’île. Le bilan démographique de 2004 estime le nombre de latins à 900, soit 0,1 % de la communauté chypriote grecque. Toutefois, un autre recensement, réalisé avec l’aide du clergé catholique romain, établit que la communauté latine compte aujourd’hui environ 7 000 membres, résidents étrangers compris. L’estimation s’élève à 13 000 catholiques romains si l’on inclut les immigrants et les travailleurs étrangers.
La communauté latine de Chypre a toujours été hétérogène d’un point de vue ethnique ; par contre, si l’on se place dans une perspective socio-économique, on constate que les latins habitaient et habitent toujours presque exclusivement en zone urbaine. L’Eglise de la Sainte-Croix à Nicosie s’est récemment adaptée à l’afflux d’un grand nombre de Catholiques venus des Philippines et du Sri Lanka en célébrant des offices dans la langue des immigrants.

D 12 septembre 2012    AIrene Dietzel

La communauté maronite

Les premiers établissements de maronites sur Chypre remontent au 8e s., lorsque les conquêtes islamiques et les rivalités entre chrétiens poussèrent de nombreux maronites originaires de Syrie et (...)

Les premiers établissements de maronites sur Chypre remontent au 8e s., lorsque les conquêtes islamiques et les rivalités entre chrétiens poussèrent de nombreux maronites originaires de Syrie et de Palestine à trouver refuge sur l’île. Les sources historiques disponibles laissent à penser qu’il existait des communautés actives sur l’île, possédant leur propre clergé résidant, aux environs du début du 12e s. L’immigration maronite s’est poursuivie tout au long de la période latine (1192-1572). De nombreux maronites répondirent à l’appel de Guy de Lusignian exhortant les chrétiens du Proche Orient à s’installer sur l’île. Toutefois, la communauté maronite n’a pas uniquement prospéré durant la période latine ; elle a également connu la pression latine, particulièrement sous la domination vénitienne (1489-1572).

Après la conquête de l’île par les Ottomans, la communauté maronite dut faire face à d’autres restrictions importantes voire suppressions de leurs droits. Beaucoup immigrèrent au Liban ou suivirent les Vénitiens à Malte. Tout au long du 17e s., un grand nombre de chrétiens, maronites mais aussi Grecs orthodoxes, s’adaptèrent au nouveau système hégémonique en se convertissant à l’islam. En 1671, le clergé latin fut exilé de Chypre. La proximité confessionnelle des populations maronite et latine, ainsi que l’aggravation nouvelle de la situation des catholiques, rapprochèrent les communautés maronite et catholique. En 1690, l’archevêque Maronios célébra l’office selon le rite maronite et catholique romain.

Les communautés maronites connurent également des pressions provenant des populations orthodoxes. Suite à un Berat du sultan, il fut décidé au milieu du 18e s. qu’ils relevaient de la juridiction de l’Eglise orthodoxe. Le clergé maronite préféra résider au Liban, et ce n’est qu’en 1845, après l’intervention de la France, qu’un évêque maronite put retourner sur l’île en tant que vicaire général. Après avoir vu le nombre de ses membres régresser sans cesse sur l’île, la communauté maronite s’étoffa sous l’administration britannique (1878-1960). Ses droits politiques et religieux furent consolidés avec le financement de la construction d’écoles par le nouveau gouvernement.

Le bilan démographique de 2004 évalue la population maronite de Chypre à 4 800 personnes. Suite aux conflits interethniques de 1963, la plupart des maronites émigrèrent au sud, où ils vivent désormais parmi les Chypriotes grecs et représentent environ 0,7 % de la population. Toutefois, il existe toujours au nord quatre villages maronites : Kormakiti, Asomatos, Agia Marina, Karpasia, d’une population totale de près de 200 personnes.

La communauté maronite de Chypre ayant été majoritairement une population agricole, le déplacement des populations rurales a eu un effet dévastateur sur les petites communautés villageoises. Néanmoins, en attendant l’ouverture de la Ligne verte en 2003, les maronites avaient le droit d’obtenir des sauf-conduits de trois jours pour se rendre dans le nord, tandis que les maronites du nord avaient droit à des sauf-conduits de cinq jours pour se rendre dans le sud. Ainsi les contacts entre les communautés villageoises et les réfugiés maronites du sud ont-ils pu être préservés.

Grâce à l’aide du gouvernement, ils disposent aujourd’hui d’églises à Nicosie et Limassol, et d’une école primaire à Nicosie. Néanmoins, à ce jour, les maronites fréquentent en majorité les écoles chypriotes grecques. La période postérieure à 1974 fut marquée par une forte assimilation et une augmentation du nombre de mariages avec des chypriotes grecs. En 1998, le St Peter’s Centre (également appelé "Maison maronite de Chypre") fut institué au Liban, dans l’intention de renforcer les liens des maronites chypriotes avec leur patrie, de fournir un cadre à cette diaspora et un enseignement de la religion et de la culture maronites.

D 12 septembre 2012    AIrene Dietzel

CNRS Unistra Dres Gsrl

Suivez nous :
© 2002-2024 eurel - Contact