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Biodroit et sphère de l’intime

Assistance médicale en matière de reproduction

Malgré la naissance en 1986 du premier bébé in vitro portugais, l’assistance médicale à la procréation (Procriação Medicamente Assistida, ou PMA) n’a été réglementée dans le pays qu’en 2006 par (...)

Malgré la naissance en 1986 du premier bébé in vitro portugais, l’assistance médicale à la procréation (Procriação Medicamente Assistida, ou PMA) n’a été réglementée dans le pays qu’en 2006 par la loi 32/2006, qui a créé le Conseil national de la procréation médicalement assistée pour réglementer cette activité. La loi s’applique aux techniques de PMA suivantes (article 1/1) : insémination artificielle, fécondation in vitro, injection intracytoplasmique de spermatozoïdes, transfert d’embryons, de gamètes ou de zygotes, diagnostic génétique préimplantatoire ou autres techniques de laboratoire de manipulation de gamètes ou d’embryons, mais elle s’applique également à la gestation pour autrui (article 1/2).

Selon l’article 6, les bénéficiaires de la PMA sont : les couples hétérosexuels ou les couples de femmes mariés ou vivant dans des conditions similaires à celles de leur conjoint, mais aussi toutes les femmes de plus de 18 ans ne présentant pas d’anomalies psychiques, indépendamment de leur état civil et de leur orientation sexuelle.

En ce qui concerne les interdictions, l’article 7 établit l’interdiction du clonage reproductif humain ou des techniques de PMA qui améliorent certaines caractéristiques non médicales de l’enfant à naître, en particulier la sélection du genre. En outre, l’article 9 interdit la création d’embryons par des techniques de PMA. Toutefois, la recherche scientifique sur les embryons est autorisée si elle a pour but la prévention, le diagnostic ou la thérapie des embryons, l’amélioration des techniques de PMA, la constitution de banques de cellules souches destinées aux programmes de transplantation ou toute autre fin thérapeutique.

Lorsque d’autres traitements ont échoué, il est du devoir des médecins de proposer aux patients des techniques de PMA qui semblent scientifiquement plus appropriées (article 11/1). Les professionnels de la santé ne sont pas tenus de superviser ou d’aider à la réalisation d’une technique de PMA si, pour des raisons médicales ou éthiques, ils la jugent inutile (article 11/2). Les médecins ont le droit de faire valoir leur objection de conscience (article 11/3).

En juin 2016, la loi 17/2016 a élargi le champ des patients des techniques de PMA et a garanti son accès à toutes les femmes, quel que soit le diagnostic d’infertilité (article 4/3). Autre nouveauté de cette loi : la réglementation plus poussée de la gestation pour autrui, établissant qu’il est possible d’y recourir en cas d’absence ou de lésion de l’utérus ou dans d’autres situations cliniques le justifiant. La gestation pour autrui doit être proposée gratuitement et faire l’objet d’un contrat de gestation pour autrui qui dépend de l’autorisation du Conseil national de la PMA.

La dernière modification légale en date, à savoir la loi 58/2017, fixe pour la première fois le sort des spermatozoïdes, des ovocytes, du tissu testiculaire et du tissu ovarien. Selon son article 16-A/1, les spermatozoïdes, les ovocytes, le tissu testiculaire et le tissu ovarien prélevés et non utilisés doivent être conservés par cryogénisation pour une période maximale de cinq ans, renouvelable pour une période égale à la demande des patients (article 16-A/2). Après cette période, le matériel génétique doit être détruit ou donné à la recherche scientifique.

Dans la note finale de la 184e assemblée plénière de la Conférence épiscopale du Portugal (CEP), tenue en 2014, l’Église catholique du Portugal a déclaré son « désaccord total » avec la légalisation de la gestation pour autrui.

D 26 février 2018    AHelena Vilaça AJorge Botelho Moniz

L’avortement

La pratique de l’avortement (ou interruption volontaire de grossesse) a été totalement interdite au Portugal jusqu’en 1984. Ce n’est qu’avec la loi 6/84 qu’apparaît « l’exclusion de l’illégalité (...)

La pratique de l’avortement (ou interruption volontaire de grossesse) a été totalement interdite au Portugal jusqu’en 1984. Ce n’est qu’avec la loi 6/84 qu’apparaît « l’exclusion de l’illégalité » de l’avortement dans certaines circonstances. Selon l’article 140/1, l’avortement est autorisé sous trois conditions cumulatives : 1) s’il est pratiqué par un médecin dans un établissement médical officiellement reconnu et avec le consentement de la femme enceinte ; 2) s’il est le seul moyen de sauver la vie d’une femme ou de lui éviter des blessures graves et durables (dans les 12 premières semaines de grossesse), en cas de « viol » (dans les 12 premières semaines de grossesse) ou de malformation du fœtus (dans les 16 premières semaines de grossesse) ; et 3) si ces conditions sont assurées par un certificat médical avant l’avortement.

Treize ans plus tard, la loi 90/97 étendait les limites de l’exclusion de l’illégalité de l’avortement à 24 semaines en cas de malformation du fœtus (article 142/c) et à 16 semaines en cas de crime contre la liberté sexuelle et l’autodétermination des femmes. Ce cadre juridique subsistera jusqu’en 2007.

En 2007, un (deuxième) référendum sur l’avortement a été organisé. Près de 60 % des Portugais ont voté en faveur de l’avortement (il avait été précédé par le référendum de 1998 où la campagne du « non » l’avait emporté). Bien qu’il ne soit pas contraignant (comme en 1998, moins de 50 % des électeurs inscrits ont voté), ce résultat positif concernant l’avortement a conduit à la publication de la loi 16/2007. L’avortement est aujourd’hui autorisé « lorsqu’il est pratiqué, avec le consentement de la femme enceinte, au cours des dix premières semaines de grossesse » (article 142/e). Les femmes sont toujours obligées de remplir les trois conditions cumulatives mentionnées à l’article 140/1 de la loi 6/84. En outre, la loi 16/2007 fixe un délai de réflexion minimal obligatoire de trois jours pour une femme avant un avortement (article 142/1/4/a) et le droit à un soutien psychologique pendant ce délai de réflexion par un professionnel du domaine social (article 142/2/2/c/d). Les médecins ont le droit de faire valoir leur objection de conscience (article 142/6).

La même année, l’ordonnance 741-A/2007 réglementait les procédures administratives et techniques de l’avortement, à savoir les dispositions sur l’organisation des établissements médicaux reconnus et sur leur accès par les femmes, sur l’ouverture d’un processus d’avortement, sur le soutien psychologique ou sur les commissions techniques de certification.

En 2015, la loi 136/2015 relative à la protection de la maternité et de la paternité modifiait pour la première fois la loi 16/2007. Cette loi visait pour l’essentiel à proposer des informations de soutien (concernant les aides sociales et financières publiques à la maternité) et à aider les femmes à prendre des décisions plus éclairées par rapport à leur grossesse.

La loi 3/2016 exemptait les femmes du paiement de frais de santé (taxas moderadoras) en cas d’avortement. Selon Pordata, le nombre d’avortements au Portugal a diminué progressivement depuis 2011, passant de 20 480 en 2011 à 16 454 en 2015.

Pour en savoir plus :
MONTEIRO, Rosa, “A descriminalização do aborto em Portugal : Estado, movimentos de mulheres e partidos políticos”, Análise Social, vol. 204, nº 3, 2012 : 586-605.

D 26 février 2018    AHelena Vilaça AJorge Botelho Moniz

Euthanasie

Au Portugal, l’euthanasie active est considérée comme un crime et punie par l’article 133 du Code pénal portugais.
Cependant, depuis 2015, la question de l’assistance médicale à mourir suscite (...)

Au Portugal, l’euthanasie active est considérée comme un crime et punie par l’article 133 du Code pénal portugais.

Cependant, depuis 2015, la question de l’assistance médicale à mourir suscite un vif débat parmi la société civile et les partis politiques portugais, surtout depuis que le parti de centre gauche portugais People Animals and Nature (ou PAN) l’a incluse dans sa plateforme électorale de 2015 en souhaitant « ouvrir le débat sur l’euthanasie ». Il était alors le seul parti politique à le faire expressément. Mais l’intérêt pour le sujet a également bénéficié de la pétition 103/XIII/1 du mouvement pour les droits civiques « Right to die with dignity » réclamant la dépénalisation de l’aide médicale à mourir, examinée par le Parlement portugais en avril 2016.
Le débat a ensuite été largement étendu dans les sphères sociopolitique et législative, via le projet de loi 418/XIII/2a, qui « réglemente l’accès à l’assistance médicale à mourir » (février 2017), et le projet de loi 773/XIII/3a, qui « définit et réglemente les conditions dans lesquelles l’anticipation de la mort, par la décision de la personne atteinte d’une lésion définitive ou d’une maladie incurable et mortelle, et qui est en proie à des souffrances intenses et insupportables, n’est pas punissable ».
Le premier projet de loi, présenté par PAN, visait à autoriser l’assistance médicale à mourir en cas de maladie ou de lésion incurables causant des souffrances physiques et psychiques intenses ou persistantes et insupportables pour le patient, ou en cas d’incapacité clinique ou de dépendance absolue ou définitive.
Le deuxième projet de loi, présenté par Bloco de Esquerda sur la base d’un avant-projet de loi de février 2017, déclarait que la demande d’anticipation de la mort relève de « la volonté libre, sérieuse et éclairée d’une personne atteinte d’une lésion définitive ou d’une maladie incurable et mortelle accompagnée d’une souffrance prolongée et insupportable ».

D 27 février 2018    AHelena Vilaça AJorge Botelho Moniz

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