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2015

  • Janvier 2015 : la Cour constitutionnelle allemande révise son jugement de 2003 sur le port du foulard par des enseignantes musulmanes

La Cour constitutionnelle allemande vient de réviser son jugement de septembre 2003 sur le port du foulard par les enseignantes musulmanes dans les écoles publiques. L’arrêt des juges de Karlsruhe de 2003 stipulait qu’une interdiction n’était possible que sur une base législative, ouvrant ainsi la voie à des lois prohibitives à l’échelle des Länder. Depuis 2004, la moitié des Länder ont interdit le port du foulard pour les enseignantes musulmanes. A Berlin, ce sont tous les signes d’appartenance religieuse sans exception qui sont interdits dans les écoles et dans la fonction publique depuis 2005.
Or, dans son jugement du 27 janvier 2015, rendu public le 13 mars 2015, la Cour constitutionnelle donne raison à deux enseignantes musulmanes de Rhénanie du Nord-Westphalie qui attendaient depuis près de cinq ans la décision des juges de Karlsruhe sur le port du foulard à l’école. Ces derniers ont estimé qu’une interdiction globale du foulard pour les enseignantes musulmanes représentait une atteinte au principe de liberté religieuse inscrit dans la Loi fondamentale. Une prohibition reste toutefois possible si le port du foulard trouble la paix scolaire de façon concrète ou s’il menace la neutralité de l’Etat. Le Conseil central des musulmans d’Allemagne, par la voix de sa secrétaire générale Nurhan Soykan, a salué l’arrêt de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe, y voyant "un signal positif".
Si ce jugement ne signifie pas une autorisation générale du port du foulard, il devrait entraîner une vague de recours devant les tribunaux. Plusieurs Länder devront donc revoir ou adapter leur législation.

Pour en savoir plus : Die Zeit, Mediendienst-integration et Der Spiegel.

  • Janvier 2015 : le mouvement Pegida

Au lendemain des actes de terrorisme qui ont coûté la vie à 17 victimes en France, 25 000 personnes selon la police (40 000 selon les organisateurs) ont défilé à Dresde le lundi 12 janvier à l’appel du mouvement anti-islam Pegida (Patriotische Europäer gegen die Islamisierung des Abendlandes, « Patriotes européens contre l’islamisation de l’Occident ») et ce, malgré les appels du ministre allemand de la Justice, Heiko Maas, à renoncer à ce rassemblement et à ne pas exploiter les attentats de Paris. Pour la douzième semaine consécutive, des manifestants ont donc défilé à Dresde en reprenant le slogan "Wir sind das Volk !" ("Nous sommes le peuple"), scandé en 1989 par les manifestants contre le régime de la RDA au cours des semaines qui précédèrent la chute du Mur de Berlin.
Une vaste contre-mobilisation a ensuite eu lieu début janvier dans tout le pays, rassemblant quelque 100 000 personnes, dont 30 000 à Leipzig. Dans plusieurs grandes villes, les opposants au mouvement Pegida ont été plus nombreux que les manifestants Pegida. Les principales cibles du mouvement Pegida sont l’islam, les étrangers, le multiculturalisme, ainsi que les médias. Pegida est soutenu par divers partis ou mouvements d’extrême droite ainsi que par le parti Alternative pour l’Allemagne (AfD), un parti anti-euro qui a manqué de peu son entrée au Bundestag en septembre 2013 et a envoyé sept députés au parlement européen en mai 2014.
Le président Joachim Gauck et la chancelière allemande Angela Merkel, ainsi que plusieurs ministres, ont participé à Berlin mardi 13 janvier à une marche silencieuse contre l’islamophobie, organisée à l’initiative d’organisations musulmanes, aux côtés du président Aiman Mazyek du Conseil central des musulmans en Allemagne. « Nous sommes tous l’Allemagne », s’est exclamé le chef de l’Etat allemand devant 10 000 personnes. Angela Merkel, qui avait mis en garde ses compatriotes contre la tentation de l’islamophobie lors de ses vœux pour l’année 2015, a réaffirmé que l’islam faisait partie intégrante de l’Allemagne.
Malgré les contre-manifestations qui ont lieu dans toute l’Allemagne, le mouvement Pegida gagne du terrain : un rassemblement Pegida est en effet prévu à Vienne début février.

Voir : Die Zeit, Der Spiegel et Süddeutsche.

D 4 mai 2015    ASylvie Toscer-Angot

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